La veuve et l'orphelin, quoi de plus émouvant ?
Un vieux copain d'école étant mort sans enfants,
Abandonnant au monde une épouse épatan---te,
J'allai rendre visite à la désespérée.
Et puis, ne sachant plus où finir ma soirée,
Je lui tins compagnie dans la chapelle ardente.
verse 2
Pour endiguer ses pleurs, pour apaiser ses maux,
Je me mis à blaguer, à sortir des bons mots,
Tous les moyens sont bons au médecin de l'â -âme
Bientôt, par la vertu de quelques facéties,
La veuve se tenait les côtes, Dieu merci !
Ainsi que des bossus, tous deux nous rigolâmes.
verse 3
Ma pipe dépassait un peu de mon veston.
Aimable, elle m'encouragea : " Bourrez-la donc,
Qu'aucun impératif moral ne vous arrê - ête,
Si mon pauvre mari détestait le tabac,
Maintenant la fumée ne le dérange pas !
Mais où diantre ai-je mis mon porte-cigarettes ? "
verse 4
A minuit, d'une voix douce de séraphin,
Elle me demanda si je n'avais pas faim.
" Ça le ferait-il revenir, ajouta-t-e-- elle,
Que diriez-vous d'une frugale collation ? "
Et nous fîmes un petit souper aux chandelles.
Verse 5
" Regardez s'il est beau ! Dirait-on point qu'il dort?
Ce n'est certes pas lui qui me donnerait tort
De noyer mon chagrin dans un flot de champagne. "
Quand nous eûmes vidé le deuxième magnum,
La veuve était émue, nom d'un petit bonhomme !
Et son esprit se mit à battre la campagne
Verse 6
" Mon Dieu, ce que c'est tout de même que de nous ! "
Soupira-t-elle, en s'asseyant sur mes genoux.
Et puis, ayant collé sa lèvre sur ma lè - èvre,
" Me voilà rassurée, fit-elle, j'avais peur
Que, sous votre moustache en tablier de sapeur,
Vous ne cachiez coquettement un bec-de-lièvre "
Verse 7
Un tablier de sapeur, ma moustache? Pensez !
Cette comparaison méritait la fessée.
Retroussant l'insolente avec nulle tendresse,
Conscient d'accomplir, somme toute, un devoir,
Mais en fermant les yeux pour ne pas trop en voir,
Paf ! j'abattis sur elle une main vengeresse !
Verse 8
" Aïe ! vous m'avez fêlé le postérieur en deux ! "
Se plaignit-elle, et je baissai le front, piteux,
Craignant avoir frappé de façon trop bruta - ale.
Mais j'appris, par la suite, et j'en fus bien content,
Menteuse ! la fêlure était congénitale.
Verse 9
Quand je levai la main pour la deuxième fois,
Le c?ur n'y était plus, j'avais perdu la foi,
" Avez-vous remarqué que j'avais un beau cul ?
Et ma main vengeresse est retombée, vaincue!
Et le troisième coup ne fut qu'une caresse